Après la publication, il y a quelques jours, par le média en ligne Eventsrdc.com d’un article intitulé : « Musée National de la RDC transformé en salle des fêtes : le coup de gueule de Vitshois Mwilambwe », plusieurs voix se sont élevées pour décrier et condamner cette situation qui n’honore pas le grand Congo. D’autres se sont as sur l’importance de cet édifice qui a coûté 22 millions de dollars grâce au partenariat de l’Agence sud-coréenne de coopération internationale.
L’on se rappellera la cérémonie marquant l’ouverture du musée national de la RDC, le 23 novembre 2019, où la joie était visible sur les visages de beaucoup d’artistes et acteurs culturels rd-congolais de voir enfin un imposant musée dans leur pays, à la hauteur de son patrimoine culturel.
Aujourd’hui, la question est celle de savoir quelle gestion pour ce musée digne de la Rd-Congo. Il est vrai que ce musée, comme d’autres extensions en provinces, n’est pas subventionné comme souhaité. Cela ne justifie pourtant pas qu’on lui fasse perdre toute sa valeur. Il lui faut donc une gestion efficace pour faire face aux défis l’heure.
Le problème que nous évoquions ici est celui de certaines activités qui y sont organisées, en dehors des misions naturelles d’un musée.
S’il y a des sollicitations en termes de location d’espaces du musée pour diverses manifestations, l’équipe de ce même musée national de la RDC devrait plutôt orienter ce public à visiter d’abord le musée avec toutes ses œuvres plutôt que de le laisser s’intéresser qu’au beau cadre qu’il offre.
Or, le musée propose un contenu très intéressant. Choqué lors d’une conversation avec une amie me disant que le cadre du musée est intéressant ; raison pour laquelle certaines personnes y vont pour les célébrations surtout de leurs mariages civils. Elle estime que ces petites manifestations permettent au musée national de la RDC de générer de l’argent nécessaire à son fonctionnement.
Comment accepter un tel choix quand on sait que plusieurs mécanismes et stratégies peuvent être mis en œuvre pour y arriver sans pour autant vider le musée de sa mission première ? Astuces que l’équipe dirigeante de cet établissement public pourraient d’ailleurs développer sans beaucoup attendre.
Au-delà du contexte socio-économique du pays, le musée national de la RDC, comme d’autres extensions de l’Institut des musées nationaux du Congo – IMNC – implantées dans certaines villes du pays, peut générer des recettes importantes, voire surprenantes. Cela est possible. Comment y parvenir ? La réponse est simple. Il suffit, pour ceux qui gèrent ce musée, de revoir leur politique managériale aux côtés, bien évidement, de la politique culturelle nationale. C’est la clé. Rien d’autre.
Une vision à la hauteur voulue
« La gestion de nos musées n’est pas à la hauteur que cela exige », avait d’ailleurs soulevé, en réaction à la publication d’Eventsrdc.com, le cinéaste et producteur rd-congolais Balufu Bakupa Kanyinda, tout en insistant sur la politique culturelle donnant un sens, selon ses dires, à la place de la Rd-Congo dans l’univers. Cet avis est partagé par plusieurs personnes. Seule, la gestion est le mot qui revient dans les discussions autour des entreprises culturelles et créatives tant publiques que privées en Rd-Congo.
Dans sa publication « Musées et management : vers la mondialisation culturelle », Corinne Baujard, professeure des universités en sciences de l’éducation à l’Université de Lille, évoque des questions essentielles de l’heure. Une fois, ces questions résolues, le résultat escompté d’un musée, voire de tout autre établissement culturel, serait sans nul doute atteint sans beaucoup de peines. L’auteure énumère entre autres « le soutien des pouvoirs publics à la culture, la concurrence des financements publics et privés, l’omniprésence du monde numérique, l’éducation culturelle et l’apprentissage, la diversité des comportements et des attentes du public ». Tous ces points évoqués sont quasiment inexistants dans la sphère culturelle rd-congolaise, et dans le cas d’espèce au niveau de l’IMNC dans son ensemble et particulièrement son extension qui est le musée national de la RDC.
Il convient de souligner que la Rd-Congo possède, à ce jour, des milliers d’objets dont près de 33000 sont entreposés dans les locaux du Mont Ngaliema où l’Institut national des musées nationaux du Congo – IMNC – a élu domicile depuis les années 70 grâce à l’ex-président Mobutu Sese Seko. Ce dernier avait initié la collecte des œuvres d’arts dans des villages afin de mieux les conserver dans le musée. La culture traduit l’âme d’un peuple. Le président de l’ex Zaïre l’avait compris en mettant ainsi à disposition les locaux – hangars – de la maison civile pour conserver toutes ces œuvres. Depuis, le musée et les services de la maison civile travaillent en étroite collaboration.
Avec 13 musées à travers le pays, sans tenir compte du volet infrastructure, la Rd-Congo peut être fière de son patrimoine culturel enviable. Seulement, l’organisation pose problème. Avec une petite volonté politique, les lignes peuvent bouger.
D’autres pistes ? Le musée national de la RDC peut attirer plus de monde en initiant notamment des ouvertures exceptionnelles de ses portes, à l’instar du Printemps des musées et que sais-je encore… en vue d’attirer de nouveaux publics. Mais cela exige de l’imagination.
Un coup de comm fera bien l’affaire
La communication joue un rôle très important au sein d’une organisation. Le musée national de la RDC ne devrait pas s’en passer. Il est appelé à mettre en place une communication adaptée et efficace, comme les autres. C’est possible.
Les théoriciens de la communication indiquent qu’une organisation qui ne communique pas est comparable à un corps inerte. Elle est appelée à disparaître. Un musée tout comme un théâtre ou une quelconque organisation d’une certaine importance ne peut pas s’en passer et doit réfléchir/élaborer sa stratégie de communication afin d’atteindre ses objectifs comme définit dans sa vision.
Le public étant au centre de leurs activités, le musée, par exemple, doit communiquer de manière efficace pour attirer ce public à visiter ses lieux et surtout, à contempler les œuvres exposées ou dialoguer avec l’histoire grâce évidement à la collection du musée.
Les influences actuelles avec les avancées des nouvelles technologies de l’information et de la communication sont à prendre sérieusement en considération. Or, au musée national de la RDC, nous avons l’impression que l’évolution numérique n’est pas prise en compte contrairement à plusieurs autres musées dignes de ce nom à travers le monde.
À titre d’exemple, les réseaux sociaux constituent aujourd’hui un canal ou un outil de communication incontournable et efficace. La plupart des musées l’ont compris et s’en servent. Le musée national de la RDC somnole, semble-t-il.
Actuellement, tous les grands musées du monde misent sur les réseaux sociaux pour attirer tout public. Ça marche très bien. Pourquoi pas alors à la grande Rd-Congo ? C’est possible de rectifier les tirs. Et cela ne nécessite pas des gros budgets. C’est juste question de vision et de volonté. Les compétences ne sont pas à rechercher. Elles sont là. C’est possible de changer les choses si et seulement si les animateurs ont une vision éclairée. C’est possible.
Par Patrick NZAZI, journaliste, critique d’art