Soucieux du développement quotidien de son pays, la République Démocratique du Congo, le rd-congolais Benjamin Umba ne veut pas se spécialiser dans les critiques comme certains de ses compatriotes de la diaspora rd-congolaise. À travers cet entretien, il compare la situation touristique de la Rd-Congo et de certains pays africains où il séjourne très souvent, et estime qu’il est grand temps que le gouvernement Sama Lukonde maximise également les recettes de son économie nationale à travers le secteur du tourisme en supprimant certaines taxes aéroportuaires, fiscales, économiques et douanières. Il pense que la guerre en Ituri et au Nord-Kivu ne doit pas être un argument valable pour empêcher les touristes du monde à visiter ce pays continent aux multiples richesses touristiques. Entretien.
Passionné du tourisme et très souvent en voyage entre votre lieu de résidence et d’autres coins d’Afrique. Quelle lecture faites-vous de tous vos déplacements ?
Beaucoup de choses ont changé avec cette pandémie. Voyager devient de plus en plus compliqué, car nous sommes à chaque fois soumis aux tests et ce qui est triste, c’est que nous ne sommes plus sûrs de voyager, car le test est fait 24h avant et les résultats sont parfois marchandés surtout en Afrique. Les tests covid-19 dans certains pays ne coûtent même plus chers que le visa actuellement.
Votre pays, la République Démocratique du Congo a neuf pays voisins et chacun d’eux a des potentialités touristiques qu’ils présentent au monde. Selon vous, qu’est-ce qui empêche au tourisme congolais de redécoller ?
Le tourisme Congolais ne décolle pas à cause de plusieurs facteurs importants dont :
– Le visa cher et parmi le plus difficile à obtenir vu les conditions administratives. En Afrique, la RDC n’offre qu’à 4 pays le droit d’entrée sans visa, 3 prennent le visa à l’arrivée et 46 pays ont droit de prendre le visa dans une ambassade ou consulat avant de voyager. Si nous comparons chez les voisins, au Rwanda, 18 pays peuvent entrer sans visa et 35 prennent le visa à l’arrivée, la Tanzanie 16 sans visa, 25 à l’arrivée et 12 pays visa à l’arrivée, et enfin, la Zambie où 14 entrent sans visa, 11 à l’arrivée et 28 visas obligatoire avant de voyager ;
– Les infrastructures, le pays manque des routes, aéroports, ports fiables comparativement aux voisins ;
– Multiples taxes dont le Go Pass, celui de covid-19 et autres n’arrangent pas les choses pour le secteur du tourisme en RDC.
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La suppression des visas d’entrée par certains pays africains ne va-t-elle pas attirer les touristes vers eux et handicaper la RDC, malgré ses multiples richesses touristiques ?
La tendance actuelle en Afrique et dans le monde est celle de faciliter l’arrivée massive des touristes en supprimant les visas. Malheureusement, la RDC ne voit pas les choses en grand. Les touristes préfèrent ne plus faire la queue dans les ambassades. À défaut de supprimer les visas, la RDC peut avoir une infrastructure moderne (IT) afin d’offrir des visas rapides en ligne communément appelés eVisa.
Pensez-vous que la mise en place du e-visa sera une solution efficace pour booster le tourisme congolais ?
Oui, le eVisa serait une solution efficace pour booster le secteur du tourisme et pour cela, il faut aussi réduire les conditions pour son obtention. Car, en RDC, même pour un simple visa touristique, il faut une lettre d’invitation de la DGM, un prise en charge et autres. Cela n’existe nul par ailleurs, même pas en Corée du Nord.
Que dites-vous du coût du visa touristique de la Rd-Congo ?
Le coût de visa reste très exorbitant, car certains arrivent à payer jusqu’à 200$ pour un visa d’un mois alors que j’ai personnellement obtenu un visa à l’arrivée en Tanzanie récemment à 50$ pour une durée de 3 mois en 10 minutes maximum.
L’insécurité en Ituri et au Nord-Kivu ne serait-elle pas un frein pour le tourisme congolais ?
Non, la RDC n’est pas le seul pays où règne l’insécurité, comment Israël, plus petit que la RDC est plus visité que les pays en paix comme la Pologne, Jordanie ou encore la grande Russie ? La RDC a 26 provinces et c’est à nous de penser comment rendre ce secteur viable dans les provinces où règne la paix.
Nous sommes à sept mois des IXe Jeux de la Francophonie à Kinshasa. Quels conseils prodiguez-vous au ministre national et au ministre provincial (Kinshasa) du tourisme, et celui de la communication et médias ?
De profiter de cette occasion pour vendre positivement l’image de la RDC en préparant les sites touristiques importants de Kinshasa et ses environs pour accueillir les nombreux touristes qui seront dans la capitale, voire préparer des avions charters pour les faire visiter l’intérieur du pays.
Pourriez-vous nous présenter un tableau comparatif des recettes touristiques 2021 des pays limitrophes de la Rd-Congo ?
Avec la pandémie, il serait très difficile d’avoir les chiffres réels vu que les frontières de certains pays sont restées longtemps fermées et les statistiques ne sont quasiment pas publiées, le cas de l’Angola et du Burundi. Sinon, la Tanzanie, par exemple, reste jusqu’à ce jour, la destination par excellence des touristes européens, précisément à Zanzibar et Kilimandjaro.
Étant trop attaché à ce secteur, ne pensez-vous pas créer une société ou multiplier des contacts pour devenir ministre en vue d’appliquer vos stratégies et maximiser des recettes ?
Avec trois amis de la diaspora et deux du pays, nous avions créé une société justement pour apporter un plus dans le secteur du tourisme. Elle peine à prendre son envol à cause des petits problèmes localement. Ayant déjà tous les documents, nous sommes buttés à certains problèmes dont la peur des touristes de venir au Congo, la problématique des visas et le prix élevé des billets d’avions pour entrer en RDC, et ceux des hôtels qui coûtent extrêmement chers comparativement à la Tanzanie voisine par exemple.
Qu’est-ce que vous pouvez faire réellement pour la Rd-Congo ?
Nos dirigeants doivent apprendre à s’ouvrir et consulter ceux qui ont la volonté de voir ce secteur évoluer. Nous sommes prêts à aider même gratuitement, mais la bureaucratie nous fait défaut, mais aussi la gratuité ne profitera pas aux décideurs, raison pour laquelle nous sommes ignorés.
Les congolais naissent, grandissent et meurent sans visiter l’immense richesse touristique de leur pays. Ne pensez-vous pas que l’élimination de certaines taxes aéroportuaires dans le secteur du transport intérieur résoudra ce problème touristique ?
Le Congo peut développer au moins le tourisme interne en réduisant les taxes pour ses citoyens. Par exemple, au Burundi, à l’arrivée, tout étranger paie 100$ pour le test covid-19, mais les citoyens burundais paient 30%. Ce qui n’est pas le cas en RDC où on applique la politique qu’il n’y a ni juif ni grec.
Nous payons tous le même prix des Go Pass et cela ne facilite pas les choses afin que les congolais profitent du potentiel touristique de son pays. Un autre exemple est le Parc National de Virunga où les congolais et étrangers doivent payer pas moins de 900$ pour le visiter. Ce qui dépasse le salaire annuel de certaines personnes en RDC.
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Un message aux opérateurs touristiques congolais et étrangers évoluant en Rd-Congo.
Aux opérateurs touristiques, de mettre la pression sur nos dirigeants afin d’ouvrir le pays. Car, cela reste la clé pour que ce secteur devienne l’un des piliers de l’économie nationale aux côtés des mines, de l’agriculture et autres ressources.
Bonne et heureuse année à tous.
REDACTION