2023 n’aura pas fait grise mine sur le plan littéraire. La magie des joyaux a su titiller notre intérêt dans une envolée vertigineuse. En RDC, le foisonnement de l’imaginaire littéraire rd-congolais a fait toute la différence et a tenu en haleine les friands et passionnés lecteurs.
Sur un transat au bord de la plage, plongé dans un bain moussant, en bibliothèque ou au café, nous avons été subjugués par des livres immersifs et étourdissants de thèmes divers.
Romans, poésies…découvrez la liste de nos coups de cœur de la rédaction de 2023.
- « Parole de perroquet », Vincent Lombume Kalimasi
Il nous conte la genèse de la démence et le chaos de l’apocalypse conçus et exaltés par la soif du pouvoir. Dans un style aigu et incisif, Vincent Lombume dépeint un univers chamarré, poussiéreux, fangeux, bref, étrange qu’il croque avec dérision, folie, extra-lucidité. La poésie rythme les intonations d’un imaginaire pour le moins exubérant : des batailles titanesques entre cliquetis assourdissants d’armes de fer forgé et étreintes violentes des personnages tantôt lugubres, tantôt somptueux, vrombissant des abysses d’une humanité somme toute triviale.
- « Cette lettre que je t’écrirai peut-être jamais », Jocelyn Danga
Un jeune soldat, seul dans sa tente une nuit noire…
Il se sent désespéré, comme acculé au pied d’une falaise. Tout ce qu’il désire, c’est écrire une lettre à sa mère. Il ne lui manque que la force de commencer…
- « Noire est la couleur de la moisson », Mapanga Makim Baby
13 nouvelles qui, dans une symphonie palpitante, peignent la réalité et l’imaginaire, braquant la lumière sur ce que la psyché et l’existence humaine ont de plus sombre, de plus secret…
13 nouvelles qui retentissent comme des cris d’espoir et de désespoir lancés par des hommes et femmes d’Afrique, grains de sable perdus dans l’immensité cruelle, sans fin…
Avec de la tragédie, du mystère et du suspense en toile de fond, ce recueil de nouvelles emporte le lecteur à travers le temps et se révèle comme autant de poignards dont les lames reflètent le réel afin de le sublimer ou le pourfendre…
- « Cris de mes entrailles », Hervey N’goma
La vie, que serait-elle sans poésie ? Et la terre sans poètes ? Un monde, ainsi le révèle le poète, qui écarterait brutalement l’humain des desseins divins et de tout ce qu’ils renferment de beau. L’homme qu’invente le poète, rêverait à tort ou à raison à se délivrer de lui-même bien avant des ogres qui rongent sa quiétude, laquelle déjà perturbée par la volonté d’architecturer, en dépit des mises en garde, le luxe qu’offre le chagrin d’aimer. Quoi faire ? Où se cacher ? Cet homme décide parfois, non sans désespoir, de creuser son espérance outre-tombe. Et qui sait, si de ses imperfections naitraient les perfections de la poésie, de la divinité ! Les cris des entrailles sont aussi ces haleines d’un lyrisme qui n’est pas mort.
- « À l’épreuve du SIDA », Elisabeth Mweya Tol’ande
L’auteure raconte les drames survenus dans les décennies 80 et 90 du 20ᵉ siècle, à une époque où la connaissance du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), causant la maladie dite « syndrome de l’immunodéficience acquise » ou SIDA, était limitée à cause d’une sensibilisation et vulgarisation insuffisante sur les modes de sa transmission et les moyens de s’en protéger. Peu conscientisés sur cette nouvelle maladie, d’aucuns à Kinshasa avaient pris à la légère toute information sur le VIH/SIDA. Ils en parlaient avec dérision comme étant un « syndrome imaginaire pour décourager les amoureux » et certains même, l’attribuaient à la sorcellerie.
Le dépistage volontaire ne se pratiquait pas encore. D’ailleurs, personne n’était disposé à connaître « volontairement » son état sérologique et à affronter une vérité qui ébranlait et anéantissait tout espoir. Les patients à qui le médecin prescrivait la recherche des anticorps HIV étaient traumatisés. L’absence d’une quelconque aide psychologique et d’une solution médicale renforçait la peur. L’annonce d’un résultat positif équivalait à un arrêt de mort.
- « Chants pour une fleur », Alvie Mouzita
Comme l’indique son titre, d’ailleurs clé pour ouvrir son mystère, Chants pour une fleur est un ouvrage greffé d’une musique rythmique où chaque mot qui roucoule tantôt comme une rivière tantôt comme un tam-tam ou une kora, confère aux cœurs la merveilleuse des émotions. Ici, Alvie Mouzita, ayant su que la femme est la source intarissable où s’abreuvent les inspirations perlières, s’est donc fait griot pour la psalmodier. Ces chants, loin d’être que des offrandes pour une jubilation, s’érigent aussi comme des stèles où viennent en pèlerinage tous les sentiments du poète, à l’instar de la mélancolie. Cette œuvre, d’une poésie sacrée et sensible, et d’un lyrisme aussi profond, est quête d’une spiritualité africaine perdue, dialogue avec l’être aimé, miroir pour toute femme.
CHADRACK MPERENG