Rien ne va entre le Royaume de Belgique et la République Démocratique du Congo depuis la dernière Assemblée Générale Annuelle des Nations-Unies tenue du tenue du 21 au 24 septembre 2016, à New-York jusqu’à ce jour. La Belgique qui exige le respect du délai constitutionnel au pouvoir de Kinshasa et la tenue des élection dans un bref délai, a réduit le jeudi 6 octobre 2016, la durée des visas octroyés aux diplomates et personnalités rd-congolaises à six mois. Kinshasa n’ayant pas voulu digéré cette décision, a réagi deux jours après par le truchement de son ministre des Affaires étrangères et de la Francophonie –Raymond Tshibanda. Pour mieux comprendre ce qui se passe actuellement et mieux comprendre ce qui se passera prochainement, Héritier Ekoto -Expert en Relations Internationales nous donne ses avis :
Chers compatriotes, je me refuse de rester loin face aux derniers soubresauts intervenus dans les relations belgo-congolaises pour en décrypter les motivations. En effet, pour marquer sa désapprobation à la situation politique en RDC notamment celle relative aux droits de l’homme, au climat politique délétère et aux difficultés qui jonchent le processus électoral alors que le pays de Lumumba est à la croisée des chemins, le Royaume de Belgique joint sa voix à d’autres membres de la communauté internationale pour exiger la tenue d’un dialogue politique inclusif alors même qu’un autre est en cours depuis plusieurs jours. Et au regard du tableau sombre peint par des observateurs avertis, la Belgique n’a pas trouvé mieux que de réduire de six mois la validité du visa pour les officiels congolais et autres détenteurs des passeports diplomatiques dans le but, sans nul doute de rendre Kinshasa enclin aux pressions internationales.
Parallèlement à cette décision, Kinshasa a, comme pour rendre à la Belgique la monnaie de sa pièce et pour ne pas baisser pavillon face à ce qui pourrait paraître comme une reculade publique aux yeux de l’opinion, décidé d’appliquer la même réduction aux officiels belges étant entendu qu’il est du pouvoir discrétionnaire de chaque État de réglementer l’entrée, le séjour et la sortie sur son territoire. Aussi, il est important de souligner que les Relations Internationales sont bâties sur les rapports de force et ces relations de puissance conduisent tantôt à la coopération, tantôt à la conflictualité.
C’est sur cette lancée que Raymond Aron, l’un des ténors du paradigme « Réalisme » en Relations Internationales parle de l’échiquier strategico-diplomatique pour peindre le tableau de ce champ politique sui generis où les États sont des monstres froids à travers deux personnages : le soldat, défenseur de la patrie et le diplomate, pourvoyeur de la paix. Il en ressort de cette conception que les Relations Internationales oscillent entre la guerre et la paix.
De plus, autant l’article 51 de la charte de l’ONU reconnait le droit naturel à la légitime défense individuelle et collective, autant la réciprocité constitue l’un des sacro-saints principes, vieux comme Mathusalem dont se servent les États au quotidien dans un jeu d’action-réaction.
Il apparaît clairement que la scène internationale est d’être un monde de bisounours où la pitié, le pardon, la charité, l’amour ont droit de cité. Par ailleurs, si du point de vue strictement juridique de l’égalité souveraine des États, la RDC et la Belgique seraient logées à la même enseigne, sur le plan de la souveraineté matérielle ou politique cette confrontation ressemble à la lutte du pot de terre contre le pot de fer lorsqu’on considère le poids réel de ces deux États sur la géopolitique internationale car la puissance est, à en croire, Serge Sur, une capacité à plusieurs degrés:
1)Capacité de faire;
2)Capacité faire faire;
3)Capacité d’interdire de faire;
4)Capacité de refuser de faire, et tout le toutim.
En définitive, il est important de faire remarquer que les relations belgo-congolaises ont souvent connu une évolution en dents de scie eu égard à certains incidents. À titre de rappel, à la suite du discours improvisé de Patrice Emery Lumumba, le 30 Juin 1960 devant le roi des Belges, qui d’une voix de stentor a dénoncé les tares d’une colonisation liberticide qui fut des congolais des citoyens de seconde zone, taillables et corvéables à merci, les relations diplomatiques entre le jeune État et son ancienne colonie connaissaient ainsi leur première zone de turbulence à tel point que la Belgique n’a pas hésité d’apporter sa caution à l’assassinat de celui qu’on traitait de communiste, le vouant ainsi aux gémonies. L’on se souviendra également des passes d’armes et autres incidents entre le royaume de Belgique et le régime de la deuxième république surtout lorsque ce dernier n’était plus en odeur de sainteté auprès de l’opinion tant nationale qu’internationale.
Pour le reste, la décision d’établir et de rompre les relations diplomatiques entre le jeune Etat et son ancien colonisateur relève de la souveraineté de chaque État qui en décide de l’opportunité. Wait and see.
HERITIER EKOTO (Expert en Relations Internationales de l’Université de Lubumbashi)