Les grands groupes français pointent un déficit en professionnels de la donnée ayant une culture technique des outils analytiques et une vision métier. Une étude réalisée à la demande d’une mission gouvernementale appelle à renforcer l’offre de formation avec des contenus liés au monde de l’entreprise.
Dans un marché ou les outils d’analytique temps réel et de prédiction sont en pleine croissance il est tout à fait logique que les compétences dans ces domaines soient de plus recherchées. Pourtant les entreprises sont confrontées à un déficit structurel de professionnels qualifiés dotés de connaissances métiers. Telles sont les conclusions d’une étude réalisée par Kantar et l’Essec Business School à la demande de la Mission numérique gouvernementale des grands groupes portée par le secrétaire d’Etat Cédric O.
Dans le cadre de cette étude, 104 répondants issus du secteur de la data ou du digital, représentant 81 grands groupes français, en majorité issus du CAC 40 ont été interrogés. Elle a été menée pour sonder les intentions de ces grands groupes et leurs projets à horizon 2 ans. Les résultats apportent plusieurs enseignements majeurs. D’abord, ils confirment la place stratégique du data scientist dans les grands groupes : 70% des interviewés affirment que leur entreprise va embaucher dans les prochains mois un profil de ce type.
Pour les grands groupes, ces compétences s’avèrent essentielles pour définir une stratégie marketing et commerciale, dans la gestion, l’analyse et l’exploitation d’important volume de données. Et encore une fois, ce rapport confirme que la demande étant supérieure à l’offre, les salaires proposés sont tirés par le haut. Autre élément clé : les répondants soulignent d’importants besoins en recrutements pour renforcer leurs équipes avec des métiers plus techniques (data engineer, data officer, data architect) tout en renforçant leurs formations.
Pour eux, ces professions nécessitent des cursus techniques spécialisés qui ne peuvent pas passer par l’upskilling, un procédé qui consiste à augmenter les compétences existantes afin de permette la continuation du même métier, ou du même domaine d’activité, ou encore dans un contexte de mutation de la fonction.
Des cursus pour renforcer les ressources existantes
Pourtant, si 43% des répondants considèrent que les offres proposées aujourd’hui par l’enseignement supérieur en France pour les métiers de la data sont suffisamment en lien avec le monde de l’entreprise, 51% à estiment à l’inverse qu’elles ne sont pas suffisantes. Alors que les besoins d’experts de la data sont en pleine croissance, ces résultats témoignent du besoin de rendre lisible les métiers de la data et leur rôle dans l’entreprise selon sa maturité, conclut ce rapport.
Guillaume Chevillon, professeur en économétrie et statistique à l’Essec Business School, analyse les résultats ainsi : « Les grands groupes français déplorent le manque de compétences hybrides en France, entre data et métiers, entre hard et soft skills », a -t-il souligné dans un communiqué.
D’où un appel à renforcer les formations mêlant science des données, sciences humaines, sociales et de management qui se sont développées ces dernières années via des alliances entre universités, écoles d’ingénieurs et écoles de commerce. Selon l’enseignant, le plus grand obstacle à la croissance ne semble pas être la pénurie de data scientists mais le manque de leaders formés aux sciences des données et à l’intelligence artificielle.
De son côté, Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques rappelle que depuis 2017, le gouvernement a mis « un coup d’accélérateur sur la formation aux métiers du secteur numérique ». La France prévoit 10 000 nouvelles entrées en formations aux métiers du numérique d’ici 2022, a-t-il rappelé.
VÉRONIQUE ARÈNE (LEMONDEINFORMATIQUE.FR)