À l’occasion de la Journée internationale de lutte contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes célébrée le 2 novembre de chaque année, l’ONG Journaliste en Danger -JED – a publié son rapport intitulé : « Nouvelle loi sur la presse, nouveaux abus contre les journalistes ».
Lors d’une rencontre à la salle St Pierre Claver à Kinshasa, en présence du ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya, du rapporteur adjoint du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC), ainsi que de nombreux professionnels des médias, JED a présenté les divers cas d’atteinte à la liberté de la presse et à l’expression à l’endroit des journalistes enregistrés en 2024. Malgré le nombre élevé de violations documentées, JED a noté des avancées pour la République Démocratique du Congo dans les classements internationaux.
À en croire le secrétaire général de JED, le rapport de cette année va au-delà de simple statistique et met un regard sur l’environnement politique et sécuritaire dans lequel travaillent les journalistes aujourd’hui. Dans ce rapport, JED a pointé du doigt toute personne qui a porté atteinte à la liberté de presse et d’expression durant cette année.
« Nous constatons qu’il y a une forte poussée politique à la restriction des espaces de liberté de presse et d’expression. Il y a comme une politique qui vise à entraver la circulation de l’information et faire taire un appel à des voix discordantes et des voix critiques. Et cela se passe à travers des intimidations contre les journalistes, à travers les suspensions des émissions, à travers la fermeture des médias. Nous avons voulu mettre en avant les personnes responsables que nous avons aujourd’hui comme des figures emblématiques qui représentent cette censure et pointer de doigt ces personnes pour dénoncer cette politique mise en place pour faire taire les journalistes, pour empêcher aux médias de faire leur travail », a fait savoir Tshivis Tshivuadi.
Un appel à l’autocensure du ministre Muyaya
De son côté, le ministre Muyaya, au-delà de ce qu’a indiqué le rapport de JED, a souligné la responsabilité des journalistes dans le traitement de l’information, tout en mentionnant les défis posés par le contexte sécuritaire actuel. Il a également encouragé les journalistes à pratiquer l’autocensure.
« Je ne mettrai pas dans la position de JED qui regarde les défis qu’il faut relever. Encore que j’aurai voulu que JED regarde aussi un peu la part ou la responsabilité des journalistes qui sont concernés dans chacun de cas que vous avez épinglé. Parce que lorsque quelqu’un se réveille et tombe sur votre rapport, il est présenté comme le bourreau, il peut se sentir lésé ou stigmatisé. Alors qu’il ne voulait que faire le travail qui est le sien. Et donc ici il faut regarder la question dans la globalité pour aller point par point. Il y a un contexte général malheureusement, celui de la guerre qui porte en lui-même les germes des attaques sur les journalistes », a-t-il dit.
Pour le ministre de la communication et médias, il existe à ce jour des impératifs liés notamment à la sécurité, à la lutte contre un certain nombre d’anti-valeurs et des journalistes qui dérapent mais qui bénéficient de la couverture du métier. Ces personnes désignées comme bourreaux par JED ont, dit-il, trouvé malheureusement, de bonnes raisons pour justifier l’une ou l’autre décision qui a été prise.
« Le jeu pour moi ne devait pas consister à aller dans ce que les autres ont comme motivation pour faire ceci ou cela, parce que qu’il y a un principe que nous voulons tous promouvoir, c’est la liberté d’expression. C’est pour ça qu’il est important et c’est pour ça qu’il était un objectif majeur pour nous dans le cadre du gouvernement de la première ministre Suminwa, d’accompagner l’installation d’une nouvelle UNPC et d’entrevoir avec JED notamment, comment cette fois-ci nous allons travailler pour une meilleure compréhension de ce que dit la loi. »
Mécanismes pour renforcer la liberté de la presse
Ces interventions ont été suivies d’un panel sur les mécanismes à mettre en œuvre pour renforcer la liberté de la presse et la sécurité des journalistes dans le contexte actuel. Le premier intervenant, Kamanda Wa Kamanda, président de l’Union nationale de la presse du Congo – UNPC – , a dressé un état des lieux de la situation médiatique. Le deuxième intervenant, Poto Poto, consultant dans le secteur des médias, a partagé son expérience de terrain pour proposer des mécanismes adaptés au contexte rd-congolais. Enfin, le professeur et député Séverin Bamani a insisté sur la nécessité d’une coresponsabilité entre les différentes parties prenantes pour établir des mécanismes opérationnels sur le terrain.
GLODY NDAYA