Modèle en matière de la REDD+ dans l’espace des pays du Bassin du Congo, la RDC doit cette réputation pour beaucoup à certaines de ses provinces forestières devenues de véritables laboratoires destinés à nourrir divers types d’expérimentations. C’est le cas de la future province de Mai-Ndombe (comprenant les districts actuels du Plateau et de Mai-Ndombe dans la province du Bandundu). Le pays envisage d’y développer un vaste programme de réduction des émissions, susceptible degénérer des dizaines de millions de dollars.
L’atelier de lancement de la phase de conception de ce programme a eu lieu, mi-février 2015, à Bandundu, Chef-lieu de la Province de Bandundu. Organisé par le Ministère de l’Environnement et Développement Durable, par le biais de la Coordination Nationale REDDde la RDC (CN-REDD), l’atelier a regroupé plus de 250 délégués, provenant du Gouvernement central, de l’exécutif provincial, des opérateurs du secteur privé, des organisations de la société civile, des représentants des communautés locales et des peuples autochtones, ainsi que les Partenaires techniques et financiers. La Banque Mondiale qui appuie la RDC dans la mise en œuvre du processus REDD+ a même dépêché de Washington une équipe à cet effet.
Un programme test ambitieux
Pour le Gouvernement, ce programme constitue une première étape dans la mise en œuvre effective de la Stratégie Nationale REDD+. L’objectif du Programme de Réduction des Emissions de Mai-Ndombe, a rappelé Joseph Balondo, Directeur de Cabinet Adjoint du Ministre de l’Environnement et Développement Durable consiste à « mettre sur pied un modèle provincial d’un programme de développement vert qui fournit des alternatives et récompense les efforts qui s’attaquent aux défis du changement climatique, à la réduction de la pauvreté, la protection des ressources naturelles et la biodiversité ».
Avec ses 12,3 millions d’hectares de superficie dont un couvert forestier estimé à 9,2 millions d’hectares, la zone juridictionnelle de Mai-Ndombe, qui inclut les Districts actuels du Plateau et de Mai-Ndombe, paraît propice à une telle expérimentation. Bien plus, il est conçu pour servir de « modèle de développement vert » dans le Bassin du Congo et de test de l’action climatique sur le continent africain et pour les pays à forte couverture forestière, mais à faible déforestation.
Concrètement, le programme consiste à présenter des solutions alternatives en vue de réduire les émissions et récompenser les performances pour relever les défis duchangement climatique, de la réduction de la pauvreté, de la conservation des ressources naturelles et de la protection de la biodiversité.Sur la période initiale de mise en œuvre du programme (2016-2020), le Gouvernement espère ainsi parvenir à une réduction d’émissions de 29 MtCO2 dont le tiers a déjà un client potentiel. En effet, la Banque Mondiale compte signer un contrat d’achat-vente pour 10 Mt de CO2 sur les 5 ans. Mais l’on n’en est pas encore là. Pour être sélectionnée parmi les 11 pays en « compétition », a rappelé Laurent Valiergue, Chargé de Projet REDD+ à la Banque Mondiale, la RDC doit présenter « un document de programme bien ficelé, avec des activités bien précises de réduction réelles des émissions ». L’ensemble des parties prenantes à ce processus ont formalisé leur engagement à œuvrer à cet effet en signant une convention de collaboration dont le but, a indiqué Victor Kabengele, Coordonnateur National REDD de la RDC, est de « mettre en place un groupe multi-acteurs pour assurer un large soutien au processus en cours et la finalisation transparente et participative du Document de Programme de Réduction des émissions (ER-PD)», lequel document devra être présenté au Comité des Participants du Fonds Carbone avant le 30 juin 2015. S’agissant des attentes des délégués des communautés locales et peuples autochtones dont les préoccupations portent sur les bénéfices à tirer de ce programme, le Coordonnateur de la CN-REDD a indiqué qu’un consultant travaillait déjà sur un mécanisme de partage « équitable » des bénéfices liés à ce programme en vue d’assurer la sécurité des moyens de subsistance à long terme et le bien-être des parties prenantes, avec une attention particulière aux groupes les plus vulnérables.
De la Note d’Idée à un Programme de Réduction des Emissions
L’idée de ce programme ne date pas d’aujourd’hui. Elle est le fuit de plusieurs années de larges consultations menées notamment par la CN-REDD et WWF auprès des différentes parties prenantes. Ces consultations avaient débouché sur l’élaboration d’une Note d’Idée d’un Programme de Réduction d’Emissions (ER-PIN). En avril 2014, le Fonds Carbone du FCPF approuve cette Note d’Idée et le pays est officiellement admis dans le pipeline du Fonds. D’où l’étape de la phase de conception proprement dite du programme, au cœur de l’atelier organisé à Bandundu-ville. Il faut noter que tout est mis en œuvre pour que le document du programme soit soumis au Fonds Carbone en janvier 2016 pour une éventuelle sélection. Plusieurs facteurs ont milité pour le choix de la zone de Mai-Ndombe pour le développement de ce programme. Il s’agit notamment du fait que 75% de la zone est couverte par la forêt. Mais celle-ci est proche de Kinshasa et se trouve ainsi sous la menace d’une déforestation consécutive à une demande toujours croissante en charbon de bois, de grumes et de nourriture pour une population de près de 8 millions d’habitants. En plus, plusieurs activités pilotes existent déjà dans la zone avec WWF, ERA-WWC, Novacel, SODEFOR, SOGENAC, FIP Investment, CARPE (USAID) et CBFF pour ne citer ceux-ci. A noter aussi que la zone représente l’habitat naturel d’une espèce des primates les plus proches de l’homme : le Bonobo, et que 1,8 million de personnes, pour la plupart agriculteurs, y vivent.
Cellule IEC/CN-REDD