L’enjeu de restitution du patrimoine culturel rd-congolais par la Belgique reste de taille. Depuis l’époque coloniale, la prise en otage de ces biens n’a cessé de cristalliser les intérêts de Kinshasa et Bruxelles. Casser les stéréotypes de l’impérialisme nécessitait leur restitution. Le gouvernement rd-congolais lutte désormais pour leur rapatriement de Tervuren. Cependant, leur conservation semble susciter interrogations et scepticisme.
Où conserver les biens culturels rd-congolais une fois rapatriés de Belgique ? Le processus de rapatriement des objets culturels rd-congolais détenus depuis la colonisation entamé par Kinshasa poursuit son bonhomme de chemin. En attendant la mise en place prochaine d’une commission mixte des experts de deux pays, les autorités rd-congolaises travaillent déjà pour le retour de 85.000 biens spoliés d’ici 2024. Le Premier Ministre Sama Lukonde, avait d’ailleurs il y a quelques semaines, remis à la ministre de la Culture, Arts et Patrimoines, Catherine Furaha, le répertoire et la cassette des objets culturels détenus par Bruxelles.
Même si d’aucuns fustigent une lenteur et des problèmes techniques dans le processus de restitution, exigeant quant à ce, des prises de décision radicales des autorités rd-congolaises, d’autres par contre privilégient la conjugaison des cultures comme norme du centre dans la restitution afin de préserver les relations bilatérales entre les deux pays.
Après la restitution, problème de conservation ?
Kinshasa est déterminée à assister à la restitution de ses biens culturels venus de Bruxelles. Mais où les conserver une fois rapatriés ?
Même si le Royaume de Belgique est prêt à restituer ces biens culturels rd-congolais, il relève cependant le problème de conservation. C’est ainsi qu’il a proposé aux autorités rd-congolaises un accord sous la forme d’une « Convention de restitution-dépot« . Comme Bruxelles, certains rd-congolais estiment également que le problème d’infrastructures pourrait être un frein pour la bonne conservation de ces objets une fois rapatriés à Kinshasa.
Relevant la problématique des espaces museaux idoines susceptibles de recevoir ces biens culturels, l’artiste visuel Vitshois Mwilambwe, plaide pour la mise en place d’une politique propice dans la construction des musées régionaux.
« Notre musée ne peut pas. Il faut construire d’autres bâtiments pour garder ces œuvres […] Les stratégies sont claires, il faut construire d’autres musées non seulement à Kinshasa mais aussi dans les provinces et former des gens qui ont l’esprit ouvert de pouvoir garder ces lieux et mettre un budget pour tout ça. C’est bien de construire mais si on ne met pas un budget, on ne met pas une bonne politique en place, il n’y a pas un bon manager qui doit manager les musées et les projets qui doivent se passer tout autour des œuvres ou de la collection, ça ne sert à rien. Notre pays, on est encore en retard dans beaucoup de choses« , a plaidé l’initiateur de Congo Biennale.
Évoquant la même problématique d’espaces pour conserver les biens culturels qui seront rapatriés de Tervuren, Jean-Pierre Eale, expert en communication, propose à Kinshasa la signature d’un protocole de récupération avec Bruxelles en vue de laisser toute la gestion au musée de Tervuren qui possède des infrastructures et l’expertise, avec un personnel qui est presque devenu parent de ces objets.
« L’actuel musée sur le boulevard triomphal est petit et les gestionnaires mettent leurs espaces aux restaurateurs et aux manifestations pour subvenir aux besoins dudit musée« , estime-t-il.
Une situation qui nécessite des stratégies idoines de la part de Kinshasa afin que ces objets soient bien conservés.
CHADRACK MPERENG