Au début des années 2000, la Rd-Congo a connu l’essor du mouvement hip-hop avec l’arrivée sur la scène musicale rd-congolaise de plusieurs jeunes artistes qui faisaient du rap et rn’b. Cette époque est réputée pour être l’âge d’or de ce mouvement artistique.
Mais après un certain temps, ce mouvement qui était très populaire auprès des jeunes de l’époque, a dû disparaître sans s’imposer solidement dans un pays dominé par la reine rumba. Récemment, le hip-hop a réussi à renaître, révolutionné par la nouvelle génération.
« C’était un mouvement, beaucoup était d’abord danseurs, après ils sont devenus chanteurs, rappeurs. C’était une génération, ce n’était pas seulement à Kinshasa, c’était partout au monde, ça touchait tous les jeunes de cette époque-là, toute la jeunesse suivait vraiment ce mouvement, l’évolution du monde », dit Shadow Barazizo, artiste musicien et l’une des voix du mouvement hip-hop des années 2000.
Il ajoute : « À l’époque on le faisait pour plus faire valoir ce mouvement hip-hop, parce que le hip hop est entré en RDC il y a très longtemps et dans notre culture, la musique urbaine découle de ce mouvement. Les jeunes avaient un message à passer, exprimer leur ras-le-bol. Et cette musique était un moyen pour eux de faire passer leur message […] Les personnes qui avaient contribué à ce mouvement sont nombreux, tels que Tonton Jacko, Rocky B, Marylyn Kankonde, Charlie Noël de Brazzaville. C’était des héros dans l’ombre qui étaient derrière nous, ils mettaient de l’argent pour nous aider à avancer, créer de la lumière sur la culture que nous étions entrain de porter. »
L’un des piliers du mouvement hip-hop des années 2000, Marshall Dixon qui en garde également de bons souvenirs de cette époque, explique ce qui motivait les jeunes artistes de l’époque.
« Ce qui nous motivait à faire de la musique hip-hop à l’époque c’était d’abord le fait qu’on avait eu une forte influence de la musique hip-hop via les chaînes qu’on regardait à l’époque comme MTV, MCM qui diffusaient beaucoup du rap américain, du rap français. Cela nous avait donnés l’envie de faire la musique hip-hop, de pouvoir intégrer ce mouvement dans notre culture », explique-t-il.
Il ajoute : « Après il y a eu des artistes qui ont commencé à en faire comme les Fatima CIA qui sont des légendes qui nous avaient permis de nous dire que les rd-congolais peuvent faire du rap, du hip hop à la manière des rd-congolais […] L’objectif de ce mouvement était de prouver qu’en RDC on pouvait faire une autre musique que le Ndombolo et la Rumba, d’assoir ce mouvement, présenter cette musique et la rendre populaire en RDC, ce qui est le cas aujourd’hui, nous en sommes vraiment fier. »
L’interprète de “Mariah” n’a pas tari d’éloges aux jeunes artistes qui s’étaient distingués à l’époque par leur créativité.
« Les gens qui avaient contribué à ce mouvement c’était nous tous qui avons milité, tous les artistes et groupes tels que les Keep Quiet, les KMS, K-Melia, Patcha Bay, Don K 1er, Bawuta Kin et autres, mais aussi les gars des studios qui nous aidaient tels que les studios Meko, Winner, Ultra décibel et autres, tous ces personnages qui avaient contribué à l’époque », rajoute-il.
Un mouvement très combattu à l’époque
« Le mouvement avait disparu pendant un moment parce la génération qui était aux affaires n’était la même que la nôtre, il y avait un grand décalage. Nous nous étions encore trop jeunes et ceux qui étaient aux affaires étaient trop âgés, ils étaient plus Wenge Musica, Koffi, Quartier latin, Papa Wemba et autres. Donc pour mettre de l’argent dans notre musique ils avaient des réticences. Raison pour laquelle on avait disparu. Mais ceux qui sont aux affaires aujourd’hui sont de notre génération. Ceux qui l’étaient à notre époque ne comprenait pas notre musique et n’avait pas confiance », explique Shadow Barazizo
L’artiste pense qu’aujourd’hui la nouvelle génération tire bien son épingle du jeu. « Les nouveaux dans le mouvement sont nombreux et eux tous ont carrément compris le jeu. Le hip-hop rd-congolais peut aller très loin. D’ailleurs, il s’impose déjà. J’ai même une chanson qui parle de toutes ces choses, le hip-hop rd-congolais a de l’avenir dans le monde. »
Marshall Dixon reconnaît des difficultés de soutien qui aura été prémonitoire à la disparition à une certaine époque du mouvement. « Ce mouvement avait disparu pendant un moment parceque nous avions atteint un niveau où pour passer le cap supérieur il fallait plus de frais à mettre dedans, il fallait plus d’argent et nous on en avait pas. Déjà que tout ce que l’on faisait c’était l’autoproduction », explique-t-il.
Il ajoute : « Les mécènes ne jetaient pas un œil sur notre musique, ce n’est pas comme aujourd’hui où les mécènes regardent partout. À l’époque, il n’y avait personne pour mettre de l’argent pour nous. Puis, on avait eu un autre problème avec les grands frères du Ndombolo qui avaient vu en nous des ennemis. Lorsqu’on avait commencé à réunir des foules, ils ont cru qu’on venait prendre leur steak alors que nous nous voulions juste avoir une musique qui fusionne le hip-hop et la leur, une musique en parallèle de la rumba et du Ndombolo. »
Qu’à cela ne tienne, Marshall Dixon se dit pourtant fier de la nouvelle génération. « On est fier de ces nouvelles générations qui ont pris la relève et continuent de faire tourner le mouvement et font assoir notre vision qui était d’assoir le hip hop à côté du Ndombolo. Aujourd’hui tu as Koffi qui te fait du rap, et des chanteurs des musiques urbaines qui te font des morceaux rumba, cela fait la beauté de la musique rd-congolaise. »
Marshall Dixon voit un avenir meilleur du mouvement hip-hop rd-congolais. D’où, il préconise la mise en œuvre des moyens conséquents afin de permettre aux artistes de garder de l’argent.
POPY-BARBARA MBOLI