À l’occasion d’une interview accordée à Eventsrdc.com, Paterne Kadiat, conseiller en charge des infrastructures numériques au ministère des postes, télécommunications et nouvelles technologies de l’information de la communication – PTNTIC – a fait le point sur les actions menées par ce ministère chapeauté par Augustin Kibassa Maliba pour augmenter le taux de la pénétration à la téléphonie mobile en Rd-Congo.
Par la même occasion, cet acteur tech rd-congolais a retracé le bilan de la tech rd-congolaise durant l’année 2022 tout en se projetant vers l’avenir.
L’année qui s’est achevée (2022) a été mouvementée avec quelques avancées tech notamment l’adoption du code du numérique. Et pour vous, comment a été la tech rd-congolaise en 2022 ?
En 2022, l’écosystème tech de la Rd-Congo a démontré qu’elle était en train de prendre en charge les défis de la Rd-Congo. Elle était en train de se mettre aussi à niveau et s’aligner en ordre de bataille pour relever les défis auxquels est exposée la Rd-Congo. Nous avons vu plusieurs événements qui ont été organisés notamment celui qui a été fait au Fleuve Congo Hôtel, Africa Digital Expo, qui a réuni plusieurs pays. Nous avons vu l’engouement autour, il y a eu plusieurs entreprises qui se sont distinguées avec leurs solutions dans les expositions. Donc la tech rd-congolaise est vraiment en train de prendre une autre dimension.
Selon vous, quels sont les tendances tech qui ont plus marqué l’année 2022 ?
Nous avons beaucoup plus vu des solutions dans la fintech. Parce qu’aujourd’hui notre pays rencontre quand-même un challenge assez intéressant en ce qui concerne la mobilisation des recettes, le paiement électronique des factures. Le Président de la République a lui-même appelé la Régideso et la SNEL à numériser leurs paiements. Vous comprenez que c’est avec la contribution de la fintech que cela sera possible. Aujourd’hui, l’écosystème est vraiment en train de prendre une tournure assez intéressante et pertinente en ce qui concerne la Fintech.
En ce jour, la Rd-Congo a réellement un écosystème tech capable de la représenter dans n’importe quel rendez-vous tech au niveau international. Comment analysez-vous l’état actuel du marché tech rd-congolais ?
Le marché tech congolais doit être porté par le gouvernement. Parce que le plus grand client de la tech c’est le gouvernement. Nous sommes en pleine transformation numérique aujourd’hui. Ce qui fait qu’il va falloir numériser pas mal des choses : les processus ; les procédures, les établissements financiers, toutes les régies financières qui sont en charge de collecter les recettes. Donc vous comprenez que l’écosystème tech rd-congolais est à la croisée des chemins dans son développement du numérique et a besoin d’un accent précis qui permet à ce que ce challenge soit relevé.
Donc nous estimons que l’écosystème tech a besoin d’être porté par le gouvernement et que ces entreprises devraient être considérées au premier plan. Parce que les solutions que nous devrions offrir à notre gouvernement devraient être purement congolaises pour conserver cette autonomie ou cette souveraineté numérique du pays.
Le gouvernement fait-il recourt à la main d’œuvre tech rd-congolaise pour tel ou tel autre projet ?
C’est quand-même assez triste de le dire aujourd’hui, mais nous voyons quand-même la volonté du gouvernement qui est en train de se manifester en ce qui concerne la tech. Nous allons prendre le cas de l’ADN par exemple, qui a fait un challenge pour avoir des entreprises rd-congolaises qui ont designé son logo. Il y a beaucoup d’engouement autour et il y a cette volonté au niveau du gouvernement de donner cette place de choix aux entreprises rd-congolaises en ce qui concerne la transformation digitale. Parce qu’il y a quand-même beaucoup d’appels d’offre qui ont été lancés, nous voyons quelques entreprises par-ci par-là.
Mais on ne devrait pas s’arrêter au niveau de volonté, on devrait faire mieux en étant pratique et pragmatique en ce qui concerne l’octroi ou l’attribution des marchés aux entreprises rd-congolaises. Donc le gouvernement a ce devoir-là de forcer et de se mettre au même niveau ou au même diapason avec les entreprises congolaises pour que celles-ci répondent et l’accompagnent dans sa transformation numérique.
Chaque année il existe de grands événements tech au niveau international. Le dernier en date était le CES de Las Vegas où la Rd-Congo était valablement représentée. Quel a été le critère de choix des startups rd-congolaises qui y ont pris part ?
Nous sommes quand-même dans un écosystème qui est regroupé au sein du réseau national des acteurs du numérique. Par exemple pour Viva tech, il y a eu une sélection qui était faite au sein de ce réseau national des acteurs du numérique. Les critères étaient l’innovation, les technologies utilisées et l’impact que cela aurait sur la population. Il faudrait également comprendre qu’il y a de plus en plus des entreprises qui naissent, qui créent de l’innovation, qui développent des solutions et qui, aujourd’hui s’alignent et sont prêtes à accompagner le gouvernement dans la transformation numérique du pays.
Puisque nous sommes encore au début de l’année, selon vous, quelles sont les tendances tech qui feront parler d’elles durant cette année ?
Nous savons que cette année est assez spéciale puisque nous organisons les élections, ce qui fait que les acteurs tech devront profiter parce que c’est une opportunité pour les entreprises qui sont plus dans le web marketing. Ils auront à vendre les candidats électoraux. Par rapport à la population, ils auront à présenter le projet. C’est une opportunité pour ces entreprises et elles devraient normalement la saisir et essayer de faire du lucre là-dessus.
Mais c’est également une année propice pour les designers parce qu’il va falloir faire des affiches, de la publicité numérique etc. La tendance cette année sera justement autour des élections et c’est pour moi aussi une opportunité pour faire un appel à toutes ces entreprises qui œuvrent dans le multimédia, de saisir de l’opportunité pour ainsi faire valoir leurs produits.
À ce jour, comment évaluez-vous le bilan du ministère des PTNTIC avec Augustin Kibassa à sa tête ?
Le bilan est largement positif. La loi des télécoms et TIC a été publiée, les mesures d’applications ont été mises en place et publiées. Nous avons les intensifs et les allègements fiscaux qui ont été mis en place pour les investisseurs qui viennent investir dans le domaine de la fibre.
Nous sommes en train de travailler également aujourd’hui sur la transformation de l’ARPTC à l’ARPTIC. Nous avons également vu que le fonds de développement des services universels est en train d’être mis en place, son rôle sera de promouvoir les télécommunications et les nouvelles technologies dans les milieux ruraux et périurbains.
Donc il n’y a pas mal des choses qui montrent ou qui démontrent que le bilan est positif. Déjà les statistiques parlent d’elles-mêmes, quand nous sommes arrivés le taux de pénétration à internet était à peu près à peine à 14 ou 15% et aujourd’hui nous sommes à 28%. Il y a le cout à internet qui a largement baissé. À l’époque, nous achetions 50 GB à 100 dollar mais aujourd’hui avec 30 dollar vous avez 55 GB. Par là on peut voir qu’il y a eu pas mal de changement positif dans le secteur. Le challenge est encore là, nous n’allons pas baisser les bras, nous continuons à travailler pour offrir un service de qualité à la population rd-congolaise.
Selon le ministère des PTNTIC, le taux de pénétration à la téléphonie mobile est passé de 44% à 52% en 3 ans. Quelles sont les actions menées par le ministère pour que plus des rd-congolais aient accès à la téléphonie mobile ?
Il y a trois actions que nous sommes en train de mener. Le tout premier est celui d’augmenter et d’encourager le partage d’infrastructures, ce qui va réduire le cout d’investissement des opérateurs. Ils peuvent mutualiser leurs infrastructures pour offrir du service à la population.
Deuxièmement, nous avons donné des allègements fiscaux qui permettent par exemple aux opérateurs qui investissent dans la fibre de bénéficier d’une réduction de presque 98% du cout de licence pour l’établissement d’un réseau de base. Et cela permet en retour à l’état d’avoir un réseau constitué de 25% de ses infrastructures déployées.
Et enfin, nous avons mis en place le fonds de développement des services universels, pour promouvoir les télécommunications et les nouvelles technologies dans les milieux ruraux et périurbains. Voilà en soi les actions clés que nous menons pour essayer d’augmenter le taux de pénétration.
Et pour ce qui a été fait par le passé, nous avons multiplié les sorties vers l’étranger. Nous avons essayé d’élargir le spectre de fréquence pour certains opérateurs. Il y a eu pas mal d’initiatives qui ont été faites au niveau du ministère des PTNTIC en collaboration avec les opérateurs et cela a mené à une baisse sensible et stratégique non seulement du prix mais aussi de l’accès à internet et de la connectivité.
Depuis 2017, la gestion du nom de domaine .cd est assurée par la SCPT, une entreprise sous tutelle du ministère des PTNTIC. Mais il y a de cela une année la gestion du .cd est attribuée au ministère du numérique. À ce jour, ces deux ministères travaillent-ils en collaboration pour assurer cette gestion ?
Selon l’article 101 de la nouvelle loi des télécommunications, n° 20/017 du 25 novembre 2020, le .cd relève du domaine privé de l’État. Ce qui fait que ce sont des ressources qui sont gérées au niveau du ministère des PTNTIC. Bien que l’ordonnance fixant les attributions des ministères l’aient confié au ministère du numérique, nous, nous respectons ce que la loi dit parce que celle-ci est au-dessus des ordonnances. Et la loi dit que c’est géré par les PTNTIC. Et ça relève du domaine privé de la loi où le ministre fixe les conditions de gestion par un arrêté ministériel. C’est comme ça que la SCPT, qui est sous tutelle du ministère des PTNTIC continue de gérer le .cd.
Il y a-t-il des attributions assignées à la fois au ministère des PTNTIC et à celui du numérique ?
Les TIC et le numérique sont des domaines très complémentaires que parfois on a tendance à croire que ce sont les siamois. Certes, il y a des choses que nous faisons ensemble dans la complémentarité. Au-delà des attributions, nous travaillons pour le gouvernement, nous devons bosser ensemble. Il y a de ces attributions qui nous forcent à travailler ensemble vu le caractère ressemblant de deux entités.
Où en sommes-nous avec le déploiement de la fibre optique dans toute l’étendue de la Rd-Congo ?
Pour déployer la fibre optique c’est un long processus. Il faudra d’abord l’octroi de licence, des études qui précèdent l’octroi de licence. Donc des études de préfaisabilité, de faisabilité, de l’impact environnemental ; sont celles-là qui sont en train de prendre un peu plus de temps par rapport aux différents gros projets que nous avons. Nous espérons que d’ici le trimestre prochain, nous serons en train de voir certaines solutions se matérialiser sur terrain.
Un mot de la fin
Je vous souhaite une excellente année et nous espérons qu’ensemble nous allons relever les défis de la transformation numérique dont notre pays a besoin.
GLODY NDAYA