Placée sous le thème « L’éducation aux médias et à l’information dans les espaces numériques : Un agenda mondial collectif », la Semaine mondiale de l’éducation aux médias et à l’information célébrée du 24 au 31 octobre de chaque année, vise entre autres à promouvoir les compétences médiatiques et informationnelles au sein de la population.
Dans une interview accordée à Eventsrdc.com en marge de cette célébration, Obul Okwess, Chef des travaux à l’Institut Facultaire des sciences de l’information et de la communication – IFASIC -, estime que la primeur de donner une information ne doit être réservée qu’à un journaliste de formation.
Du 24 au 31 octobre, l’humanité toute entière célèbre la Semaine mondiale de l’éducation aux médias et à l’information. À votre avis, qui doit-être éduqué? Est-ce les créateurs d’informations où les consommateurs de l’information ?
Je crois que le concept “éducation aux médias” n’est pas lié aux créateurs de l’information. Ce concept a été créé pour sensibiliser le public, les consommateurs à pouvoir regarder d’un autre œil les contenus des médias. C’est leur donner des capacités pour pouvoir détecter dans le contenu des médias, ce qui est bien et ce qui ne l’est pas mais aussi d’avoir un sens critique envers le contenu des médias.
Les créateurs des contenus des médias sont déjà formés en ce sens. On constate plutôt du côté des consommateurs, qu’il manque ce sens critique de détecter ce qui est bien de ce qu’il ne l’est pas. C’est ainsi que cette éducation aux médias vient leur apporter les outils dont ils ont besoin pour pouvoir analyser et critiquer les contenus des médias.
Le thème retenu pour cette année est « L’éducation aux médias et à l’information dans les espaces numériques : Un agenda mondial collectif ». Dans le contexte congolais, pensez-vous que cette notion soit possible ?
Aujourd’hui il est possible d’éduquer surtout quand on parle du numérique. Parce que si on regarde bien aujourd’hui, la consommation de l’information se fait plus à travers les plateformes numériques qu’à travers les médias traditionnels, tout au moins dans les villes. Parce qu’il faut dire que la consommation de l’internet est très répandue dans les endroits où il y a la connexion et l’électricité, donc dans les villes. Mais pas dans les milieux ruraux.
Je pense donc qu’aujourd’hui ce sujet s’accroche plus à des milieux urbains où on a la possibilité d’avoir effectivement l’accès aux plateformes numériques. Mais cela n’exclut pas que l’éducation aux médias d’une manière générale puisse se faire, parce qu’il y a beaucoup d’endroits dans notre pays où le numérique n’est pas une grande réalité. Peut-être juste 2 ou 3% de la population ont accès à ces outils. Pour aller sur les réseaux, il est important de savoir lire et écrire, donc avoir des pré-requis alors que les médias traditionnels eux donnent la possibilité même à ceux qui ne savent pas lire et ni écrire de suivre.
Dans le contexte congolais, ce thème cadre plus avec une frange de la population mais pour la grande majorité de la population, c’est juste l’éducation aux médias d’une manière générale. Ça veut dire, utiliser toutes les ressources de médias qui existent, tous les moyens de communication, tous les supports, c’est en ce moment là qu’on peut avoir des résultats.
Quelle serait la méthode adaptée pour y arriver?
La méthode adaptée c’est de passer par les médias pour faire l’éducation aux médias. Parce qu’on ne peut rassembler les gens dans des salles de cours pour leur donner l’éducation aux médias. Même s’il est recommandé, pour les études en communication par exemple, que l’on puisse intégrer l’éducation aux médias, on formerait les gens qui eux, vont aller former les autres. Mais sinon, si on veut atteindre le plus grand nombre avec une éducation rapide aux médias, il faut utiliser les médias pour faire l’éducation aux médias.
Cette méthode est plus rapide parce qu’on atteint en ce moment-là, un plus grand nombre de personnes au même moment où alors on peut utiliser des structures par exemple celles qui font l’alphabétisation. Essayer d’insérer là dedans un petit module sur l’éducation aux médias. On peut également utiliser des groupes organisés comme des églises, des associations… pour des églises, la mieux placée serait l’église catholique où il y a des groupes comme Bilenge ya Mwinda, la Commission des intellectuels et autres. On peut les utiliser avec des petits modules très simples pour leur montrer comment suivre, lire les médias. Mais aussi comment essayer d’analyser le contenu des médias.
À en croire l’UNESCO, cette célébration vise entre autres à promouvoir, au sein de la population mondiale, les compétences médiatiques et informationnelles. Dans un monde où chaque individu a non seulement la possibilité de comprendre une information, mais aussi de la produire et de la partager de façon responsable, quel serait alors le rôle du journaliste ?
L’UNESCO a souvent ouvert la notion de pourvoyeur d’informations. Pour elle, tout celui qui pourvoit l’information a droit d’être protégé. Mais, malgré ça, il y a des gens qui ont comme métier primaire, d’être informateur, ce sont les journalistes. Il faut donc leur donner un peu plus de consistance dans ce qu’ils font. Il faut un peu mieux protéger le travail qu’ils font.
Mais l’éducation aux médias, comme on l’avait dit, ne concerne pas beaucoup les pourvoyeurs d’information. C’est surtout ceux qui consomment l’information parce que pour les pourvoyeurs, pour certains, il suffit d’avoir un téléphone, savoir le manipuler pour devenir pourvoyeur d’information. Mais encore, est-ce que ce qu’on pourvoit comme information, l’est vraiment ou c’est juste des nouvelles. Le vrai pourvoyeur d’information devait rester le journaliste, qui lui a reçu la formation capable de savoir ce qui est bon à diffuser et ce qui ne l’est pas. En plus avec l’éthique qu’il faut parce que derrière ça, il y a une éthique.
Bien que l’UNESCO essaie d’élargir tout cela, nous nous disons que malgré cet élargissement, on devrait donner la primeur aux journalistes qui ont été formés pour pouvoir donner une information qui est traitée selon les normes et derrière ça, il y a toute une éthique que les autres n’apprennent pas. On ne peut donc pas accepter que ces gens puissent donner l’information à leur guise alors qu’on sait qu’elle ne remplit pas tous les critères d’une bonne information. Celle qui est vérifiée et contre-vérifiée à travers d’autres sources, c’est-à-dire faire la confrontation des sources. Si cela n’est pas le cas, on risque d’aboutir à la désinformation et c’est ce qui arrive souvent.
GLODY NDAYA