S’il était pugiliste, il boxerait dans la catégorie des lourds, au regard de son passé plein des prouesses et ses états de service qui plaident en sa faveur. Dire que son parcours est digne d’éloges ne serait qu’une lapalissade. Faisant partie d’une race comme on n’en fait plus sous les tropiques… Une chose est sûre : ceux de la génération d’après n’ont pas pu le faire oublier dans les esprits, voire infléchir une certaine opinion largement répandue affirmant que Santos parti, personne n’a pu faire mieux. Muntubile a su forcer l’admiration, indifféremment que vous soyez de Daring, V.Club ou de Mazembe, de manière unanime tout le monde est resté admiratif vis-a-vis de ses capacités intrinsèques.
Supporter de Dragon depuis mon jeune âge, j’avais vu passer de nombreux joueurs dans cette équipe notamment Saio Mokili, Ngunza, Mvukani, Mobati, Mayele, Empole (mon oncle paternel), mais Santos Muntubile est le joueur qui m’a le plus marqué comme Kakoko chez les imaniens et le duo Freddy Mayaula/ Adelar Mayanga dans V.Club. Digne descendant de la classe des Pelé, voire plus près de nous, de Messi. Je le revois dans mes rêves sur le terrain en train de faire de la balle tout ce qu’il veut et celle-ci lui obéi au doigt et à l’œil d’après selon une expression consacrée. De lui je garde le souvenir d’un grand joueur, talentueux dribbleur et buteur ainsi que passeur décisif. Il a démontré partout et ailleurs notamment dans le championnat de France et d’Allemagne.
De sa carrière d’entraîneur, il a fait un bon parcours avec le TP Mazembe. Il est le premier sélectionneur, vainqueur du Chan (Championnat d’Afrique des nations réservé exclusivement aux joueurs évoluant dans leur pays) et n’a jamais eu de chance avec l’équipe de son coeur le Fc Dragon. Il est revenu à la rescousse pour sauver ce qui reste de cette équipe qui a tout perdu, même les supporteurs. Étonnant que la derniere-né des équipe kinoises, Renaissance, déplace plus de monde que Dragon.
Un certain 12 décembre 1980, il a sorti un des matches qui est resté dans les annales. Alors que AS Bilima, au mieux de sa forme, a contraint le Canon de Yaounde à Garoua au nul (2-2, match aller comptant pour la finale de la Coupe des clubs champions), Santos jura par tous les dieux qu’il offrira le trophée au pays entier qui n’attendait que ça. Ironie de l’histoire !
Au stade du 20 mai, ce fut une grosse désillusion de voir les Camerounais après avoir laissé passer la tempête en première mi-temps (score vierge) infliger un cinglant 3-0 aux nôtres. Santos a tout essayé multipliant des incursions dans le camp d’en face assorties des dribbles chaloupés et passes millimétrées à ses coéquipiers Mayele, Mangala, Empole et Mobati. Sans succès. Au dernier coup de sifflet, des larmes ont perlé sur ses joues. Il s’est effondré sur le gazon… C’est là où il a décidé de ne plus continuer à jouer dans un club local. On parla de trahison au niveau du staff dirigeant. Ça c’est une autre histoire ! Dans l’entre-temps, il avait tapé dans l’oeil des recruteurs notamment ceux de Sochaux évoluant dans le championnat de France. Voilà comment il s’exila pour aller monnayer ses talents dans l’Hexagone. Puis ce fut Marseille, Valenciennes et Sarbruke en Allemagne.
Quelques années après, Santos est revenu en sélection pour donner à nouveau la preuve de son savoir-faire. Les Congolais d’en face en gardent un amer souvenir. Ce derby a tourné à une démonstration de Santos qui, à lui seul, a survolé la rencontre du stade de la Révolution devant un public médusé réduit à admirer outre lui-même (l’expert en la matière) les déboulés d’Eugène Kabongo Ngoy, Lofombo, Kiyika, Masengo, Emedo Kongolo… Un véritable régal à la limite de l’humiliation. A l’arrivée, un ronflant 5-2 au compteur. Les Congolais de l’autre rive ne s’en remettront jamais. L’ombre de Santos a longtemps hanté les esprits là-bas… Deux ou trois fois encore, il a réédité l’exploit sous d’autres cieux faisant de lui une des pièces maîtresses de notre football.
Né le 20 décembre 1958, Santos est revenu aux commandes de son équipe chérie (comme président) après avoir laissé ses empreintes en tant que coach de Mazembe notamment qu’il amena en coupe d’Afrique. Sa carrière a été tellement marquée par des dribbles qu’il en a gardé des stigmates : sa démarche a quelque peu pris la même courbe. Il suffit simplement de bien l’observer pour s’en convaincre…
JEAN PIERRE EALE IKABE (CP)